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    Pascal Quignard est un écrivain Coltranien.

    "Impressions" d’un musicien de jazz et improvisateur à la lecture du livre "Les Ombres errantes " Texte paru dans Improjazz en 2010.

    Pascal Quignard est un écrivain Coltranien.
    "Impressions" d’un musicien de jazz et improvisateur à la lecture du livre
    "Les Ombres errantes ", prix Goncourt 2002,
    premier volume de "Dernier Royaume ".
    Texte paru dans Improjazz en 2010.

    Progressivement l’immersion dans ce texte et la façon dont les idées abordées sont induites au fur et à mesure de la lecture m’ont fait penser à plusieurs aspects de la musique de John Coltrane.

    Tourner autour du thème dans le jazz, s’en servir, le déformer, le moduler
    font partie intégrante de cette musique, c’est ce que fait ici Pascal Quignard avec ses idées.
    Les thèmes abordés sont développés par fragments de diverses longueurs et intensités, poétiques, historiques, simples ou complexes.
    L’écrivain tourne autour de
    la création, la solitude des créateurs et des amateurs d’arts non commerciaux, l’histoire, la culture de masse.
    Mes comparaisons et impressions sont sur la construction du livre, certains sujets et quelques compositions de John Coltrane.

    Pascal Quignard écrit par moments des phrases courtes poétiques et compréhensibles :
    " Chaque océan est une larme du temps",
    " Chaque vague était comme un grande tuile d’or qui s’élevait, qui avançait".
    Elles sont comme la mélodie simple et mémorisable de "Naïma".
    Souvent le contenu des phrases est plus complexe :
    "La fragmentation est l’âme de l’art", "La paroi est la peau humaine à l’intérieur de la paupière".
    Dans cette alternance entre simple et complexe on retrouve la tension/détente, le jeu in et out du phrasé jazzistique : jouer dans une tonalité et en sortir par des altérations ou par superpositions d’autres tons.
    C’est perceptible entre le A de Naïma avec ses deux premiers accords très doux
    et le B où la tension harmonique augmente avec plus de dissonance.

    Des passages plus longs avec des références historiques, sur la préhistoire, Rome, des rois, des écrivains, s’intercalent, donnent des clefs au lecteur sans tout expliquer.
    De même les gammes mineures pentatoniques, qui font partie de l’histoire de la musique, sont intégrées au son de John Coltrane
    et nous donnent un repère.
    Des mots peu usités ( "anachorèse dirimante" "néoténie" "asystasie") rappellent l’utilisation d’intervalles, de modes, de manière innovante, où l’on comprend beaucoup
    moins, où l’on se laisse prendre par le flot des mots ou par le flot de notes dans les solos du saxophoniste dans l’album "Giant Steps".

    La rythmique du texte dans ses alternances entre phrases isolées,
    passages très brefs, chapitres plus longs
    ce serait cette superposition dans le support du thème musical et l’improvisation entre un riff de basse répétitif : "Spiritual", "Africa" et les solos.
    "Spiritual" est posé sur quatre notes, "Africa" l’est sur deux notes, elles forment un gimmick qui permet au soliste de partir
    au delà de ce cycle court pour un développement d’idées plus complexes en phrases longues.
    "L’individu le soliste est comme la vague qui se soulève à la surface de l’eau la rythmique"
    Ainsi au fil du texte les phrases courtes donnent le point de départ à des séquences plus longues et approfondies, de plusieurs pages.

    Une phrase résume le propos sur la création et les créateurs :
    " On ne peut être à la fois gardien de prison et un homme évadé "
    John Coltrane est un homme évadé de la prison des grilles harmoniques, parti très loin, dans les "Interstellar Spaces".
    L’idée : "La fragmentation est l’âme de l’art" se vérifie dans la séparation qu’il effectue d’avec les manières de jouer, d’harmoniser, précédentes, séparation qu’il affirme tout au long de son parcours.
    En une dizaine d’années John Coltrane aura apporté de nombreux concepts toujours utilisés.

    "La marginalisation des écrivains et des musiciens est certaine et durable"
    En allant au bout de ses idées en jouant toujours plus librement John Coltrane s’est coupé d’une partie de son public et du monde du jazz.
    Les écrivains difficiles aussi sont en dehors : "C’est la morale dominante qui définit la marginalité".
    Les lecteurs, le public de ces créations à part, vivent eux aussi une solitude.
    Je pense aux musiques improvisées à leurs artistes, leurs lieux, leur public chez lesquels l’ombre de John Coltrane, libre, continue d’errer.
    " Ces trois ou quatre, ils se cachent ; ils fondent des sociétés secrètes fragiles. Mais dans le coin, ils se repassent des oeuvres publiées à neuf exemplaires qui parmi toutes les marchandises , ne marchandent rien du tout".

    Je ne sais pas si Pascal Quignard aime la musique de John Coltrane et le free, mais la musicalité m’a semblé omniprésente dans son livre.
    "Un contrepoint est un chant supplémentaire qui diverge de la ligne mélodique. Ecrire en contrepoint signifie écrire en réplique à l’énergie principale".

    Quand on ferme le livre on peut lire sur la couverture :
    "Il y a dans lire une attente qui ne cherche pas à aboutir. Lire c’est errer. La lecture est l’errance".
    Ce qui deviendrait musicalement :
    Il y a dans improviser une attente qui ne cherche pas à aboutir. Improviser c’est errer. L’improvisation est l’errance.
    Quand on ferme ce livre il a ouvert des portes, elles s’ouvrent aussi à l’écoute de "Stellar Regions"…
    Henri Roger.

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