La rencontre

Marcel Bataillard est à l’origine d’I Burtuoni, groupe à géométrie variable fondé en 2005 pour travailler au corps le son des chants corses, et concilier âpreté originelle et recherche contemporaine. Toutes les créations consistent en des relectures de « standards » du répertoire traditionnel profane, aussi bien les polyphonies et monodies que les sérénades. « Chants traditionnels d’avant-garde », ils mêlent voix, instrumentarium décalé et effets numériques.

Par ailleurs, co-organisateur du Festival Manké, Marcel Bataillard avait déjà eu l’occasion d’assister à de nombreuses créations d’Henri Roger, souvent programmé au festival, la plupart du temps pour des cartes blanches surprenantes. Il avait été ainsi naturellement amené à suivre l’évolution personnelle de ce pianiste hors-norme, et notamment à travers ses fructueuses et variées collaborations, enregistrées pour le label Facing You/IMR, avec des musiciens venus d’horizons très différents,.

Au moment où la formule « solo » d’I Burtuoni (voix + effets live sur kaoss pad), lui donnait satisfaction, Marcel Bataillard a pensé que le moment était venu de proposer une collaboration plus directe à Henri Roger, qui lui semblait le pianiste idéal – doté d’une forte personnalité musicale mais sachant rester à l’écoute de ses partenaires - avec qui croiser le fer sur des musiques insulaires.
Lors de la première « répétition » – M.B. « détricote » la trame d’un « traditionnel », H.R. dialogue avec lui en improvisant au piano –, dès les premiers accords improvisés du duo, l’entente a été manifeste. À la seconde session, l’idée de garder une trace enregistrée du son si particulier qui émanait de la rencontre est devenue un objectif prioritaire. Pour préserver la surprise ressentie et recherchée à chaque nouvel essai, Henri Roger ne savait jamais à l’avance quel titre allait être entonné par Marcel Bataillard, pour préserver un maximum de variations possibles et ne pas installer de routine, le duo a ensuite très peu répété. Mais il a pris date pour enregistrer au studio Sextan durant l’été : cet album est le fruit turbulent de cette journée de libre échange.